ASSE - 1983-1987 : Le début du règne d'André Laurent
Dans le cadre des 90 ans de l’ASSE, nous revenons sur les différentes périodes qui ont fait son histoire. Après avoir évoqué la création du club, la première grande domination de l'ASSE sur le football français, l'arrivée d'Herbin à la tête de l'équipe, les deux années mythiques de 1975 et 1976, l’apparition de la première étoile sur le maillot, l’affaire de la caisse noire, nous revenons sur le début du règne d'André Laurent.
En acceptant la présidence de l’ASSE, André Laurent dont l’entreprise fabrique, entre autres, des écrous, sait qu’il va devoir «serrer la vis». Il est en poste depuis le 3 mai 83, et «son règne» avait commencé par une fin de saison plutôt insipide. Avant l’entame de l’exercice suivant, 83-84, le club est moribond. La première tâche du nouveau boss sera de trouver un entraineur pour remplacer Guy Briet qui a assuré, tant bien que mal, la délicate succession de Robert Herbin licencié. Son choix se porte, curieusement, sur Jean Djorkaeff, le père de Youri, ancien international de renom, mais dont l’expérience de technicien se limite à deux saisons à la tête du FC Grenoble, alors en D2.
La caisse noire ne pouvant plus tenir les engagements du club, beaucoup vont aller voir ailleurs, sans doute aussi pour certains, pour des raisons uniquement sportives. Laurent Roussey signe à Toulouse, Battiston file à Bordeaux, Genghini à Monaco, Larios au Canada, Lestage à Tours, Paganelli à Toulon, Colleu rejoint Angoulême et Gérard Janvion, dernier survivant du onze de Glasgow, retrouve Rocheteau et Bathenay au Paris SG. Johnny Rep, est retourné dans son pays, tout comme le Danois Christiensen, qui lui, n’aurait jamais dû le quitter. Avec Simondi ex-tourangeau, sont engagés, Kupcewicz, international polonais et Robert Sab en provenance de Nice, ainsi que les attaquants Daniel Sanchez qui était à Mulhouse et Carlos Diarte international paraguayen qui arrive du Bétis Séville. Incontestablement, l’objectif n’est pas de rajouter de nouvelles lignes au palmarès mais plutôt de sauver les meubles à moindres frais.
Ce que l’on redoutait arriva. Avec la plus mauvaise attaque du championnat (31 buts) et 19 défaites les Verts terminent 18èmes et doivent disputer deux matchs de barrage face au RC de Paris. Jean Djorkaeff n’est plus là. Il a été remercié début avril, après une des plus lourdes défaites de l’histoire verte (0-7) à Bordeaux, futur champion. Robert Philippe, intérimaire, n’a pu redresser la barre mais ils sont près de 45 000, ce 19 mai 84 à Geoffroy-Guichard pour assister au barrage retour face au Racing Club de Paris. La plupart de ceux qui ont vécu l’épopée européenne sont dans les gradins.
L’ASSE en D2 ? Absolument personne ne peut l’imaginer, allons ! D’autant plus que les Verts ont obtenu un nul encourageant à l’aller. Lorsque l’arbitre M. Konrath siffle la fin du match le stade est muet, la France du football abasourdie. Battu (0-2) le club le plus prestigieux du pays se retrouve en deuxième division trois ans après avoir été champion de France. Ironie du sort, il se retrouvera au même niveau, que son voisin et meilleur ennemi l’Olympique Lyonnais, alors que Marseille fera le chemin inverse. Le Chaudron vibrera encore quelques semaines plus tard. C’est grâce à l’Équipe de France qui dispute sur ses terres l’Euro 84. Geoffroy-Guichard a été rénové pour l‘occasion. Avec trois buts de Platini, déjà Ballon d’Or, elle vient à bout de la Yougoslavie qui réalisera son meilleur match du tournoi ce jour-là (3-2).
Les 47 000 personnes présentes apprendront, peu après la rencontre, que Bojeda Milenovic, le docteur yougoslave, que l’on a vu pendant le match, être secouru dans l’urgence au bord du terrain, est décédé à l’hôpital de Saint-Étienne suite à l’accident cardiaque dont il avait été victime. 1984 fut une année noire pour le club stéphanois mais, faste pour le football français, qui verra les Bleus remporter leurs premiers trophées. Avec un Michel Platini au sommet de son art, ils sont sacrés champions d’Europe en battant l’Espagne en finale. Cerise sur le gâteau, le 11 août suivant, aux Jeux de Los Angeles, l’Équipe de France Olympique remporte la médaille d’or en battant le Brésil (2-0). Le Stéphanois Jean-Louis Zanon (en partance pour Marseille) a participé grandement à ce succès.
Maintenant, retrouver très vite la D1 est le seul objectif que l’on a fixé à l’entame de la saison 84-85. Roger Milla, Ballon d’Or africain arrive de Bastia et le défenseur Didier Gilles de Marseille. Le Chaudron a du mal a digérer la rétrogradation. Excepté le Derby qui sera suivi par 26 000 personnes, aucune des six premières affiches n’attirera plus de 8 000 fidèles. Cela va évoluer progressivement et l’on va même atteindre les sommets dans ce domaine. Il faut dire que les hommes d’Henry Kasperczak, arrivé de Grèce, effectuent un bon parcours. Le Derby, inédit à l’étage inférieur, est de retour. Les "banlieusards" lyonnais vont le regretter. Alors qu’en début de saison l’ASSE, encore en rodage, lui avait concédé un match nul à Geoffroy-Guichard (0-0), le retour à Gerland va tourner à la démonstration. Une vraie leçon de ballon, avec une étincelante victoire verte (5-1) dont quatre buts inscrits après la pause. Les gones ne sauveront l’honneur qu’à la dernière minute. On a même vu ce jour-là, une partie du public lyonnais applaudir des actions stéphanoises. Pas sûr que ce soit le cas de l’entraineur des rhodaniens, il s’appelait Robert Herbin...
Classés deuxièmes du groupe B à deux points de Nice, les Verts devront passer par un tournoi de barrages pour tenter de retrouver la D1. Ce sera une nouvelle très grosse déception. Alors qu’elle a l’avantage de disputer le match unique du premier tour à la maison, l’ASSE s’incline devant Rennes (0-2). Ce sont les Bretons qui au final remporteront ce tournoi. En coupe, Saint-Étienne épinglera Tours et Lens, clubs de D1 et éliminera Nice, futur champion de D2. L’histoire retiendra que c’est en évoluant en D2, qu’un match de l’ASSE remplira le Chaudron comme cela ne se produira plus jamais. C’est le quart de finale face à Lille, équipe de D1, qui établira le record d’affluence de toute l’histoire du club : 47 747 personnes ont assisté ce jour-là, à la victoire surprise de l’ASSE (1-0). Ce court succès sera insuffisant car le LOSC remportera la rencontre retour (2-0) et se qualifiera pour les demies.
85-86 sera une deuxième saison consécutive en enfer. Bernard Pardo milieu « aboyeur » et l’attaquant Tony Kurbos, excellent buteur, arrivent en renfort ainsi que Jurgen Milewski international allemand qui ne disputera que cinq rencontres. Dès la septième journée, Geoffroy-Guichard assiste à un évènement dont on parle encore en Haute-Loire. Le Puy, vient défier l’ASSE en championnat. C’est un match de haut de tableau et, le plus surprenant, c’est que le leader, n’est pas de vert vêtu. Ce sont les Ponots qui sont en tête, l’ASSE est 3ème. Il faut dire que l’équipe d’Hugo Bargas ex-international argentin, avec entre autres Frédéric Antonetti et Juan Carlos Acosta (qui a côtoyé le roi Pelé au Cosmos de New-York) a fière allure. Certains d’entre eux, reconnaitront avoir été ahuris et déboussolés en pénétrant sur la pelouse. 42 584 personnes sont dans les gradins, ce qui constitue la huitième affluence de tous les temps. L’autre Derby, contre l’OL n’attirera, quelques mois plus tard, "que" 37 800 spectateurs. La hiérarchie sera renversée, Le Puy s’inclinera (0-2) et terminera la saison à une honorable septième place, alors que les Verts, finiront en tête de leur groupe.
L’enfer de la D2, c’est terminé. Tout n'a pas été parfait, loin de là. Après avoir atomisé Montluçon, alors en D3, au 1er tour de la Coupe de France (9-1 dont un quadruplé de Kurbos) c’est, Moutiers, club de DH qui fera sensation en sortant Saint-Étienne au tour suivant. La saison se terminera sur une autre fausse note. Le RC Paris, qui avait expédié l’ASSE au sous-sol deux ans auparavant, sera sacré champion de D2 en remportant la finale face aux Stéphanois : défaite 2-3 à Colombes et match nul 1-1 dans le Chaudron. Le soulagement de la montée est tel que l’on dira presque, peu importe. L’essentiel avait été fait, revoilà les Verts parmi l’élite, que pour beaucoup, ils n’auraient jamais dû quitter.
Maintenant, il s’agit de ne pas de faire l’ascenseur. L’effectif est transformé avec huit arrivées et autant de départs notables. Les principales recrues sont, Slavkov et Dimitrov, deux Bulgares en provenance de Sofia, Krimau arrive du Havre, Bénédet de Toulon, Jacques du PSG, Belkebla et Lemasson du Red Star. Côté départs, Ceccarelli, Pardo, Oleksiak, Bellus, Gilles, Redon, Kurbos et Milla pour ne citer qu’eux, ne sont pas retenus. Castaneda, Primard, Daniel, Peycelon et Ferri restent fidèles au club. Tout ça pour une saison médiocre. Avec seulement neuf victoires pour 14 défaites les Verts termineront à la 16ème place avec la 19ème attaque (27 buts) en 1987, mais avec étonnamment la deuxième défense, avec 32 buts concédés, soit seulement cinq de plus que le champion Bordeaux. C’est alors qu’André Laurent, comme il en rêvait diront certains, rappela le Sphinx aux manettes (Robert Herbin). D’autres affirmeront que c’était sous la pression de Casino. Sarramagna et Repellini devenaient adjoints, Garonnaire était également de retour en tant que conseiller technique. À Saint-Étienne, cela ne plait pas à tout le monde, le contraire eut été étonnant. Les détracteurs rappellent qu’un proverbe prétend que "l’on ne peut pas être et avoir été".
Parcours de l’ASSE lors de la période 1983-1987 :
- 1984 D1 : 18ème, rétrogradée en D2 après barrages
- 1985 D2 : 2ème du groupe B, battue en barrage d’accession.
- 1986 D2 : 1ère du groupe A – Vice-championne
- 1987 D1 : 16ème
Publiés tous les jeudis, retrouvez l’ensemble de nos épisodes sur la grande histoire de l’ASSE :
👉 Retrouvez le premier épisode de cette mini-série (1933-1960)
👉 Retrouvez le second épisode de cette mini-série (1961-1970)
👉 Retrouvez le troisième épisode de cette mini-série (1970-1974)
👉 Retrouvez le quatrième épisode de cette mini-série (1975-1976)
👉 Retrouvez le cinquième épisode de cette mini-série (1976-1981)
👉 Retrouvez le sixième épisode de cette mini-série (1982, de la fièvre verte à la caisse noire)