La data, la nouvelle marotte de l'ASSE

Club | Publié le par Tibo | 15 commentaires

En prenant la présidence de l'AS Saint-Étienne, Ivan Gazidis a amené dans ses bagages le discret mais très impliqué Jaeson Rosenfeld, vice-président de Kilmer Sports Ventures et homme fort du nouvel actionnaire du club à Saint-Étienne avec Huss Fahmy.   

Si Ivan Gazidis a amené dans ses valises Jaeson Rosenfeld, ce dernier a emmené avec lui son logiciel data, présenté comme la Rolls-Royce des outils à disposition sur le marché et une liste de prospects comprenant plus de 500 joueurs. C'est lui qui a ciblé les joueurs à recruter cet été, épaulé par Loïc Perrin en reprenant le fonctionnement du club sur les derniers mercatos. Car avant son arrivée, le club sous l'impulsion de son coordinateur sportif avait déjà pris le virage de la data pour son recrutement, s'appuyant sur un autre logiciel, plus limité, ainsi que sur un mathématicien qui avait intégré le club afin de pouvoir traiter les différentes données recueillies. Si le club du Forez couvrait à ce moment là une trentaine de championnats, la base de données de Jaeson Rosenfeld va beaucoup plus loin avec plus de 100 championnats répertoriés à travers le monde. C'est ce qui a par exemple permis d'aller chercher Ben Old en Nouvelle-Zélande.


La cellule de recrutement de l'ASSE a vu Ilan quitter ses fonctions pour intégrer le staff d'Olivier Dall'Oglio. Ils ne sont désormais plus que trois à avoir des fonctions dans cette cellule, Jaeson Rosenfeld donc, Loïc Perrin et Anthony Gillot. L'AS Saint-Étienne a abandonné au moins provisoirement le "scouting". Quelques clubs en France ont également ce parti pris en matière de recrutement, c'est le cas du Toulouse Football Club, souvent présenté comme une référence en la matière, avec une certaine réussite sportive, puisque le TFC a pu remonter en Ligue 1, s'y établir, remporter au passage une Coupe de France et participer à une compétition européenne. Comme toujours en matière de recrutement, un rendement financier est attendu, souhaité, espéré. Du côté du club de la ville rose, le bilan est nuancé. Le club a vu partir de nombreux joueurs venus via la data, libres (Branco van den Boomen, Stijn Spierings, Rhys Healey ou encore Brecht Dejaegere). Les Toulousains ont également connu quelques flops comme Veljko Birmancevic mais aussi de belles réussites avec Logan Costa vendu 18M€, Christian Mawissa vendu 16M€ ou encore Thijs Dallinga vendu 15M€. 


Du côté de Saint-Étienne, la méthodologie pour recruter s'appuie donc sur le logiciel de Jaeson Rosenfeld qui permet de sortir une liste de noms, selon les critères recherchés. Une analyse vidéo est ensuite réalisée, par les différents membres de la cellule de recrutement, attribuant chacun une note aux joueurs. Cette première étape, si elle est validée mène à une étude plus poussée du profil du joueur qui peut être, occasionnellement, confirmée par une supervision sur place. Un fonctionnement qui demeure encore singulier dans le milieu, puisque de nombreux clubs continuent de concilier l'utilisation de la data pour le recrutement avec le scouting plus classique. À titre d'exemple, l'OGC Nice peut s'appuyer sur une équipe de scouts comprenant 7 membres, dédiés à Nice mais aussi au Lausanne Sport, autre club appartenant à INEOS. Des scouts qui se déplacent tous les week-ends sur les terrains pour travailler à la supervision des joueurs.

L'utilisation de ce logiciel ne s'arrête pas là, il sert au quotidien l'ASSE pour analyser les adversaires, il a aussi été utilisé pour déterminer le club le plus à même de permettre à Karim Cissé de s'épanouir en prêt. Son utilisation ne se limite donc pas au simple recrutement, il intervient dans plusieurs domaines de la vie du club et de ses joueurs. Reste à en mesurer l'apport concret et c'est le terrain cette fois-ci qui va parler. 


Trois questions à Guillaume Duriatti, consultant en scouting et ancien recruteur du Stade Rennais FC 

Tu as déjà utilisé le logiciel de Jaeson Rosenfeld ?

Je ne l'ai pas vu, j'en ai en revanche déjà entendu parler. Ce qu'on m'a expliqué c'est qu'il s'agit d'un outil plus complet par rapport aux autres avec lesquels on peut avoir l'habitude de travailler comme Hudl ou InStat. 


Où se situe les limites de la data ?

La data elle sort des chiffres. On va pouvoir connaître le nombre de kilomètres effectuées par match, de tacles réussis, de passes réussies, de passes à deux mètres réussies, à 5 mètres, à 10 mètres, les passes longues, les centres, toute une somme de données individuelles sur le joueur. 

Ensuite, ce que la data ne donne pas c'est l'attitude du joueur en phase offensive ou défensive. Elle ne donne pas les courses utiles et inutiles. Une chose qui est devenue primordiale dans la société actuelle, c'est la mentalité sur le terrain et en dehors, elle n'est pas non plus en mesure de la donner et d'autres critères qui sont aussi déterminants, importants.
La data est aujourd'hui essentielle pour la cellule de recrutement mais pas plus essentielle que l'œil. Les deux doivent cohabiter ensemble dans l'analyse globale du joueur. D'ailleurs, le paradoxe c'est que la data est recueillie par des personnes qui se déplacent sur les terrains. 


Beaucoup de clubs en Ligue 1 n'utilisent que la data dans le recrutement ? 

À ma connaissance, il n'y a que Saint-Étienne et Toulouse. Lorient l'a aussi fait et ça lui a coûté sa place en Ligue 1. Je ne connais pas d'autres équipes ne s'appuyant que sur ça. La plupart des autres clubs continuent d'aller voir des joueurs qu'ils trouvent intéressants. La data est utilisée pour valider des points forts, ils sont ajoutés aux rapports des scouts mais la supervision ne se fait pas qu'avec cet outil. 


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