Le Tallec : "L'ASSE, cela leur pendait au nez"
Pendant près d'une demi-heure, l'ancien attaquant de l'AS Saint-Étienne mais aussi du Havre, Anthony Le Tallec, s'est confié à Evect. L'homme de 38 ans évoque sa reconversion, son passage en vert mais aussi la situation du club. Il apporte également son regard sur les attaquants stéphanois du moment.
Pour commencer, peux-tu nous donner de tes nouvelles Anthony ?
J’ai arrêté le foot il y a deux saisons à Annecy. J’avais une reconversion au club, je suis resté ici et je passe mes diplômes d’entraineur depuis deux ans. Cela suit son cours, cela me plaît. J’ai en plus en charge les attaquants du club à partir des 14 ans. Donc cela me plaît ce truc-là. Aujourd’hui je suis assez satisfait de ma reconversion.
Dans le futur, tu aimerais donc devenir entraîneur ?
Je ne sais pas, j’essaie de voir encore. Je ne sais pas si je vais aller au DES (Diplôme d'état supérieur) l’année prochaine, le diplôme supérieur pour entraîner une N2. Pour l’instant je suis avec les U17 Nationaux et les attaquants du club. J’ai l’objectif d’aller dans un staff pro parce que je passe le spécifique attaquant cette année. Cela va devenir obligatoire dans les staffs pro donc c’est un objectif aussi d’aller chez les pros le plus rapidement possible. Si cela ne se fait pas, je continuerais avec les jeunes et je continuerais à passer mes diplômes. J’ai plein de trucs en tête. Mon objectif premier c’était d’être directeur sportif d’un club, mais je pense qu’il y a des étapes pour arriver là. Pour moi, il faut voir tout ce qui se passe au niveau du coaching pour arriver à ces postes-là. Cela suit son cours et pour le moment ça va, il y a des bons résultats en plus donc c’est cool.
"J’ai joué de débutant jusqu’en pro là-bas donc je connais tout du Havre. C’est là-bas que j’ai appris le foot"
Tu as été formé au Havre avant d’y faire tes débuts en pro, quels souvenirs en gardes-tu ?
J’en garde évidemment de très bons souvenirs. J’ai joué de débutant jusqu’en pro là-bas donc je connais tout du Havre. C’est là-bas que j’ai appris le foot. C’est là-bas que je me suis épanoui. Je leur dois tout car c’est grâce à ce club que j’ai pu faire une carrière de 20 ans.
Tu rejoins Liverpool à seulement 18 ans ensuite. À ce moment-là tu réalises un rêve de gosse ?
Oui parce que j’avais des envies d’Angleterre. J’étais suivi depuis pas mal de temps par les clubs anglais, depuis l’âge de 13 ou 14 ans. C’était un rêve, j’avais tous les clubs sur moi depuis que j’avais été vice-champion d’Europe (Euro des moins de 16 ans en 2001, ndlr) et champion du Monde (des moins de 17 ans en 2001, ndlr). Je pouvais choisir et j’ai choisi Liverpool.
C’était donc un suivi de longue date et il n’était donc pas trop tôt pour toi pour partir en Angleterre ?
Non, ce n'était pas du tout trop tôt pour moi. Souvent j’en parle : chacun a sa carrière. Pour moi il fallait prendre ce train, y aller. Je n'ai aucun regret : j’ai gagné la Ligue des Champions avec Liverpool, j’ai joué la Coupe de l’UEFA également. J’ai connu de grands joueurs… Donc je n’ai aucun regret par rapport à cette signature. J’aimerais bien savoir qui refuserait un club de ce standing. Cela me fait souvent rire quand j’entends des médias dire que je suis parti trop tôt à l’étranger. C’était comme ça, c’était ma carrière et je suis fier ! Je suis fier d’avoir connu ce club, ce niveau, ces joueurs. Aujourd’hui je suis encore invité à Liverpool pour des matchs de légende, je suis fier de tout ça.
"J'ai voulu aller à l'ASSE parce que c'est un club mythique français"
Tu es prêté à plusieurs reprises par le club anglais, notamment à Saint-Étienne en 2004-2005, quel regard portes-tu sur ta courte aventure en Vert ?
Cela a été court mais ce que je dis aujourd’hui c’est que c’est assez extraordinaire parce que j’ai fait six mois là-bas mais je garde beaucoup de contacts, beaucoup d’amis que j’ai côtoyés là-bas. Il y a des clubs où je suis passé trois ou quatre ans dans lesquels je n’ai pas gardé de contact. Dans ce club-là, j’ai gardé une dizaine de contacts, d’amis. Même si j’ai passé que six mois, cela s’est mal passé avec Élie Baup, en plus Liverpool voulait me reprendre, mais ce club là j’ai voulu y aller parce que c’est un club mythique français. Malheureusement c’était court mais j’en garde de très très bons souvenirs.
Avec qui gardes-tu encore des contacts à l’ASSE ?
Ce week-end j’ai fait un match avec les anciens Verts contre les anciens de Valence. J’ai pu revoir Fousseni Diawara, Bridonneau, Carl Medjani… Beaucoup d’anciens et cela fait plaisir. J’ai pu garder contact avec Loïc Perrin qui est directeur sportif. Je garde ce lien avec Saint-Étienne.
Tu nous parlais de tes envies de devenir directeur sportif, Loïc Perrin est coordinateur sportif du club. T’attendais-tu à le voir dans ce rôle-là ?
Pour être honnête, non. Je sais qu’il a été vite propulsé à ce poste-là. Tant mieux pour lui. Je sais que c’est quelqu’un qui est très fidèle au club, donc cela ne me surprend pas de le voir y avoir des fonctions et y être encore aujourd’hui. Je n’avais pas forcément pensé à ce rôle-là pour lui bien évidemment mais Loïc c’est quelqu’un de très fidèle, et quelqu’un de bien donc cela ne me surprend pas que la direction l’ait choisi.
Tu nous parlais de nombreux bons souvenirs en vert, si tu devais en sortir un, ce serait lequel ?
Mon premier but à Geoffroy-Guichard. Le premier but inscrit par l’ASSE depuis sa remontée en Ligue 1, contre Strasbourg. J’en ai marqué qu’un (sourire) mais je dirais celui-là. C’était mon premier match en tant que titulaire et je marque d’entrée donc bien évidemment je garde ce souvenir-là, ce bon souvenir.
Après des passages au Mans, à Auxerre ou encore Valenciennes, tu finis ta carrière de footballeur à Annecy, club où tu entraines désormais et dont l’équipe fanion est en Ligue 2. Peux-tu nous parler du club annécien ?
Je connais bien ce club, cela fait quatre ans que je suis ici. Je l’ai connu en tant que joueur, maintenant je suis passé de l’autre côté. Je connais très bien le fonctionnement, c’est un club qui est ambitieux. C’est pour ça j’ai signé ici. J’ai signé ici en N2 et maintenant on est en Ligue 2. Il y a eu du chemin et c’est un club qui est en développement, en construction. Le président et la direction sportive ont vraiment beaucoup d’ambition. J’espère qu’on va se maintenir cette année et pérenniser ce club-là en Ligue 2. On est dans une super région ici et cela peut attirer beaucoup de bons joueurs.
Es-tu allé au stade pour les deux matchs face à l’ASSE ?
Oui, j’y étais. Saint-Étienne était un peu dans le mal à cette époque, quand ils sont venus chez nous. Je pense qu’ils ont fait un super recrutement notamment avec Charbonnier même s’il s’est blessé aujourd’hui. C’est lui qui a impulsé l’équipe à avoir de bons résultats. Ils ont bien recruté, avec un bon gardien, Larsonneur, et plusieurs joueurs par ligne. Aujourd’hui, ils vont se maintenir. Je suis content parce que l’ASSE n’est pas à sa place ici.
Pour se recentrer sur #HACASSE, voyais-tu les deux équipes à ces places-là en début de saison ?
Non, honnêtement, pas du tout. Je ne voyais pas Le Havre ici et rester là-haut si longtemps avec l’effectif qu’ils ont. Saint-Étienne non plus je ne les voyais pas là, bien évidemment. Même si on sait qu’une descente, cela fait mal, je ne les voyais pas autant galérer. Le Havre je les voyais plus quatrième ou cinquième et jouer la deuxième place jusqu’au bout. Mais je ne les voyais pas là, ce serait mentir que de dire l’inverse.
"Cela leur pendait au nez, quand ça se passe mal là haut, cela se répercute sur le sportif malheureusement"
Quel regard portes-tu sur la situation stéphanoise plus globalement ? Ces années galères pendaient-elles au nez des Verts ?
Oui cela leur pendait au nez. Depuis plusieurs années, il y a des difficultés là-haut au niveau de la direction, avec les différents présidents. On le sait depuis longtemps, c’est connu. Cela leur pendait au nez, quand ça se passe mal là haut, cela se répercute sur le sportif malheureusement.
Le problème vient donc de la direction selon toi, tu l’as connue, ressentais-tu déjà à l'époque des dissensions ?
Moi au départ je ne l’ai pas ressenti. Mais c’est après, avec des discussions avec des joueurs et puis on lit des choses et on voit les différents coachs qui viennent, les différents joueurs… Un moment donné, c’est sûr que tu le payes cash.
Maintenant en Ligue 2, que doit faire la direction de l’ASSE pour remettre ce club à flot selon toi ?
Je pensais qu’ils allaient vendre déjà, parce que cela fait un petit moment qu’on parle de ça. Je pensais donc que ce club allait être vendu, que ce club là, allait repartir de zéro mais finalement cela ne s’est pas fait. J’étais un peu surpris par rapport à ça parce que ça fait un petit moment que j’entends des choses, qu’on me dit des choses et que cela ne se fait pas. Mais bon, c’est leur choix, le principal c’est que Saint-Étienne se maintienne et pourquoi pas viser la montée l’année prochaine.
Tu es plutôt optimiste pour l’ASSE ?
Oui oui, cela va repartir. C’est obligatoire pour des clubs comme Saint-Étienne. Là c’est une année galère on en est conscient mais l’année prochaine pour moi, l’ASSE doit viser la montée !
Qu’est-ce qui a manqué aux Verts cette saison ?
Ce sont des choix de joueurs. Je ne parlerai pas du coach parce qu’il a fait du très bon boulot notamment à Troyes. Il a connu une montée en Ligue 1 avec l’ESTAC. Les choix de joueurs étaient pour moi trop jeunes et l’effectif n’avait pas le niveau Ligue 2. On l’a vu, c’est pourquoi dès le mercato hivernal il y a eu beaucoup de recrues parce que ce n’était pas possible. C’est mon point de vue. La Ligue 2 c’est quand même un niveau élevé.
Regardes-tu souvent la Ligue 2 ?
Oui je la regarde tous les week-end. Je regarde tous les matchs d’Annecy en premier lieu. Mon frère joue à Sochaux maintenant donc je suis Sochaux, Le Havre, Valenciennes, l’ASSE… Les clubs où je suis passé.
"Pour performer en Ligue 2, il faut un super gardien et un joueur qui te marque beaucoup de buts"
Quelles sont les armes pour performer dans ce championnat ?
Pour performer, il faut un super gardien et un joueur qui te marque beaucoup de buts. Après, j’avais ce discours-là, mais quand je vois Le Havre aujourd’hui, ils n’ont pas de buteur. Ils ont un bon gardien mais ils n’ont pas un mec qui a mis beaucoup de buts. Mais il y a une osmose, un mélange d’expérience et de jeunesse avec des joueurs de très grande qualité au milieu de terrain. Le coach a amené ses idées et cela fonctionne. C’est une équipe très solide qui prend très peu de but et cela marche. J’étais un peu sceptique cet hiver parce que pour moi il fallait un attaquant de renom pour monter et ils ont quand même gardé le cap. On voit que cela bosse très bien. Ils ont fait des recrues, mais pas la recrue phare. Ils voulaient faire Charbonnier mais cela ne s’est pas fait, il est parti à Saint-Étienne.
En parlant d’attaquant qui marque des buts, l’ASSE en compte un dans ses rangs c’est Jean-Philippe Krasso. T’attendais-tu à le voir à ce niveau-là cette saison ?
Je l’avais vu sur le match entre Épinal et l’ASSE en Coupe de France (en 2020, victoire des Verts 1-2, ndlr). Je l’avais trouvé très très intéressant. Après sa signature à l’ASSE, il s’est un peu perdu avec des prêts (au Mans et à Ajaccio, ndlr). Après c’est un joueur qui a un très gros potentiel et il a exprimé toutes ses qualités cette année. Saint-Étienne s’est un peu reposé sur lui durant toute la première partie de saison. Heureusement qu’il était là, même s’il a été plusieurs fois suspendu. C’était malheureux pour Saint-Étienne, parce que c’est l’élément fort devant. L’association Krasso-Charbonnier, j’ai validé tout de suite !
Un attaquant est davantage clivant du côté de l’AS Saint-Étienne : Ibrahima Wadji. Toi qui a aussi été attaquant, quel regard portes-tu sur le joueur ?
Je dirais qu’il y a des profils différents. Comme j’ai été joueur, je suis plus sensible à des joueurs plus techniques, plus fins comme Charbonnier. Maintenant, je me rends compte aussi qu’on a besoin de profils comme Wadji, qui te font du bien. Wadji il a de très grosses qualités athlétiques, parfois il est maladroit mais il t’ouvre quand même des défenses, il fait mal et je pense qu’il faut s’en servir. Quand je jouais au Mans, il y avait Gervinho qui était un peu dans ce profil-là, de Wadji. Cela ouvrait des brèches bien évidemment. Même s’il y avait beaucoup de déchet, mais cela ouvrait quand même des brèches et cela me permettait d’avoir des opportunités. À Lille derrière il a bien corrigé le déchet qu’il pouvait avoir à ses débuts (sourire).
Ton coeur sera havrais ou stéphanois ce samedi ?
C’est sûr que Le Havre c’est mon club de coeur. C’est là où j’ai grandi, là où j’ai tout mes amis. J’espère qu’ils vont monter parce que cela fait longtemps que les supporters attendent ça. Oui je serai un peu plus derrière le Havre.
Ton pronostic ?
Je dirais 2-1 pour Le Havre.
Malgré leur superbe saison, les Havrais ont du mal à déchaîner les foules en L2. Toi qui a connu beaucoup de clubs et donc beaucoup de publics, comment jauges-tu celui havrais et celui stéphanois ?
Il faut dire quand même qu’au Havre on aime le foot. C’est une ville de foot, il y a cette culture là, il y a des supporters. J’ai le souvenir de la montée en Ligue 1, il y avait une grande ferveur dans notre stade. Aujourd’hui, le club ne remplit pas le stade, il l’a peut-être rempli deux ou trois fois cette saison. Il faut dire que c’est la Ligue 2. Même s’ils sont premiers et qu’ils jouent la montée, cela reste la Ligue 2. En Ligue 1, ce sera autre chose. Cela attire plus de monde la Ligue 1. La Ligue 2, cela attire moins, c’est comme ça il faut l’accepter.
Je garde un très grand souvenir de Geoffroy-Guichard, c’est connu comme le Chaudron, ça pousse, ça pousse ! Anfield ? Je n’ai pas besoin de l’expliquer… J’ai connu de très grands derbys dans mes clubs : Liverpool-Everton c’était grandiose, Sunderland-Newcastle c’était incroyable. J’ai pu faire Saint-Étienne-Lyon aussi, j’en ai connu... Saint-Étienne quand même, il y a de très très grands supporters !