Pour Puel, ce qui est réalisé à Saint-Étienne est "assez exceptionnel"
Le magazine Vestiaires consacre un très long dossier à Claude Puel. L'entraîneur des Verts se confie sur sa carrière, ses méthodes et sur le projet stéphanois. Un projet très complexe qui colle parfaitement avec son parcours.
"Quand je vois mon parcours, je me dis que je suis un peu maso. Je suis allé là ou pas un technicien sensé, qui a envie de faire carrière, ne serait allé. Parce qu'il n'y avait que des coups à prendre. Joueur, déjà, j'aimais qu'on me mette dans l'équipe la plus faible, pour me challenger. C'est un truc à la con mais qui m'a toujours suivi, encore aujourd'hui. J'ai rarement hérité d'équipes performantes et j'ai dû souvent repartir de zéro pour gravir les échelons. Mais toujours avec l'envie d'aller jouer le haut de tableau, la coupe d'Europe. À certains moments, j'ai récolté les fruits de mon travail, à d'autres ce sont mes successeurs qui en ont bénéficié.
Bien sûr que là où j'ai entraîné, mes dirigeants ont déjà dû se demander à certains moments s'ils devaient appuyer sur le bouton ou pas. Mais je m'en fous ! Dans ma tête, je suis libre. S'ils ne l'ont jamais fait (excepté à Leicester), c'est que la force qui m'animait, mon assurance, leur donnaient quelque part certaines garanties.
J'ai la prétention de vouloir que mon équipe impose son jeu contre n'importe quel adversaire, tout en adoptant ses réponses, sur le moment, aux problèmes qui lui sont posés. Et, en cela la longue période à huis clos nous a été profitable, paradoxalement, car je pouvais davantage me faire entendre des jeunes, les aider... Là, c'est devenu plus compliqué. Toujours est-il que je reste focus sur mes joueurs. Tout changer avant un match en particulier, ce n'est pas moi. Je ne suis pas un entraîneur de coup. Je suis dans le moyen terme, animé par la volonté de développer mon équipe, encore et encore. Moi je préfère des joueurs qui ont moins d'expérience mais qui correspondent techniquement à ce que je recherche, c'est à dire repartir correctement de derrière, et dotés d'un vrai potentiel. Entre un vieux briscard expérimenté mais limité, et un jeune qui va progresser et qui représente l'avenir du club, sportivement et financièrement, mon choix est tout fait. C'est ce que j'ai entrepris à Lille, à Nice, et que j'essaye de faire aujourd'hui à Saint-Étienne.
Ce qui est réalisé depuis deux ans à Saint-Étienne, dans les conditions dans lesquelles cela est réalisé, c’est assez exceptionnel. Il y aurait tant de choses à dire et de belles histoires à raconter ! Parfois, j’essaye d’expliquer, mais bon… On ne retient que “ils ont gagné” ou “ils ont perdu”, c’est comme ça. C’est un travail ingrat car les gens ne savent pas. Ils voudraient qu’on joue l’Europe alors qu’on est en mission de sauver le club (sic) et notamment financièrement, en dégageant des actifs avec le développement de jeunes joueurs. Avant que d’autres profitent, plus tard, de notre travail… En attendant, je dois continuer à avancer, le plus souvent dans l’adversité et l’incompréhension, en essayant de ne pas faire porter tout ce poids aux joueurs ni au staff."