"A Sainté, l’ASSE est un objet de discussion quotidien comme peut l’être la météo"
Historien et auteur d'une thèse sur le football et l'ASSE, Pascal Charroin est aussi maître de conférence à l'université de Saint-Etienne. Dans Le Progrès, il revient sur l'importance et l'histoire d'un derby entre l'AS Saint-Etienne et l'Olympique Lyonnais :
"On peut considérer le foot comme un fait social total, selon l’expression de l’anthropologue Marcel Mauss, notamment à Saint-Étienne. Le ratio entre le nombre de spectateurs et la population du bassin Loire sud est important. À Saint-Étienne, l’ASSE est un objet de discussion quotidien comme peut l’être la météo.
L’histoire des premiers derbys remonte aux années 20-30. Il y avait des matches entre des clubs amateurs de Lyon-Villeurbanne et Saint-Étienne. On a retrouvé des traces d’incidents avec par exemple un dirigeant lyonnais qui avait piqué la recette. L’OL n’existait pas encore. Des années 50 à 80, les derbys sont restés relativement calmes. On était dans des derbys presque sympathiques. Saint-Étienne dominait incontestablement Lyon en termes de football. Il y avait une certaine logique, un certain équilibre. Lyon dominait la ville en termes d’économie et Saint- Étienne prenait sa revanche sur le plan sportif. À partir de 83-84, il y a la création des fan-clubs. Puis, à partir des années 90, les supporters se sont structurés autour des groupes ultras. Saint- Étienne a reculé, Lyon a progressé et la concurrence s’est exacerbée.
Est-ce que le derby représente une sorte de lutte des classes ? Le derby de Saint-Étienne l’ouvrière contre Lyon la bourgeoise, c’est un peu surfait, mais il y a une part de vérité et de romantisme sociale. À Saint-Étienne, les gens de la catégorie ouvrière sont beaucoup plus représentés que dans les autres stades de France."